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La protection juridique des seniors en perte d'autonomie
Au milieu du XVIIIème siècle, l'espérance de vie était d'environ 28 ans. Elle se situe aujourd'hui à 85 ans pour les femmes et 78 ans pour les hommes. Mais l'allongement de l'espérance de vie ne signifie pas forcément finir en pleine possession de ses capacités.
La génération des nouveaux cinquantenaires découvre actuellement le stress de devoir gérer le quatrième âge de leurs parents qui sont en difficulté en raison de leur perte d'autonomie de décision. Le législateur s'est intéressé à ce problème en expansion et a mis en place des mesures de protection juridique afin d'aider la personne subissant une altération de ses capacités. Une gradation dans les mesures a été définie en fonction de la gravité des cas.
1/ LE MANDAT DE PROTECTION FUTURE
Il s'agit d'une mesure préventive qui permet à une personne (mandant) de désigner à l'avance la personne (mandataire) qui devra s'occuper de ses intérêts dans un futur où elle pense ne plus être en capacité de le faire elle-même. Il s'agit d'un contrat libre, notarié, ou sous seing privé.
2/ LA SAUVEGARDE DE JUSTICE
C'est une protection juridique de courte durée qui permet à la personne qui subit une altération temporaire de ses capacités d'être représentée pour accomplir certains actes. Cette procédure d'urgence d'une durée d'un an, renouvelable une fois, est de la compétence du tribunal d'instance.
3/ LA CURATELLE
Cette procédure est établie à la demande d'une personne qui souhaite aider un proche ayant besoin d'être assisté de manière continue dans les actes de de la vie civile. Le juge auditionne la personne qui a demandé la mise sous curatelle. Le bénéficiaire de la procédure est également entendu.
En fonction de l'altération de ses capacités, il sera défini un niveau de protection adapté à la situation :
- curatelle simple : ne concerne que les actes importants comme, par exemple, la souscription d'un emprunt.
- curatelle renforcée : le curateur perçoit les revenus de la personne et règle ses dépenses.
- curatelle aménagée : le juge définit les actes que la personne peut accomplir seule ou non.
La durée de la curatelle est de cinq ans maximum mais peut être renouvelée par décision du juge, en fonction des circonstances.
4/ LA TUTELLE
Cette mesure du ressort du tribunal d'instance est la plus contraignante. Elle est mentionnée en marge de l'acte de naissance de la personne sous tutelle. Dans ce cas, le tuteur désigné agit seul, au nom de la personne sous tutelle, pour tous les actes de la vie civile. Le tuteur est choisi en priorité parmi les proches de la personne à protéger.
Le juge peut aussi désigner un subrogé tuteur dont le rôle est de surveiller les actes passés par le tuteur et éventuellement de le remplacer en cas de problème. Un tuteur ad hoc pourra aussi être désigné lors de conflits d'intérêts entre le tuteur et la personne protégée. La désignation du tuteur peut aussi être confiée à un conseil de famille nommé par le juge. Dans tous les cas, le tuteur rend compte de ses actes à la personne protégée et au juge.
Toutes ces mesures s'appuient évidemment sur un dossier détaillé et notamment sur des certificats médicaux circonstanciés établissant l'altération des capacités de la personne à protéger. Les médecins doivent être assermentés auprès du tribunal. Une enquête sociale peut aussi être demandée par le juge. La durée de la protection ne peut excéder cinq ans mais est susceptible d'être, comme la curatelle, renouvelée par le juge compétent.
Il faut aussi intégrer que les délais d'instruction peuvent atteindre six mois.
5/ LA PROCURATION BANCAIRE
Cette mesure n'est pas réellement une protection juridique pour la personne qui a perdu son autonomie. Néanmoins, elle facilite le quotidien de la personne en difficulté. La personne qui reçoit procuration, peut effectuer les opérations bancaires pour laquelle elle a été désignée. Ces opérations peuvent être limitées à certains actes ou à la totalité des opérations bancaires. La personne qui a reçu procuration ne doit évidemment pas être interdite bancaire.
A noter également que le titulaire du compte bancaire qui a donné procuration à une tierce personne reste responsable des opérations effectuées.
CONCLUSION : LES LIMITES DU SYSTEME
Ces dispositions ne sont pas toujours facilement acceptées, notamment par les séniors. Ayant eu autorité sur leurs enfants et restant souvent une référence morale pour eux, la personne qui arrive au quatrième âge perd progressivement ses prérogatives. Cette dégradation très déstabilisante pour tous peut être vécue comme une humiliation. Il appartient à l'entourage valide de faire preuve de diplomatie pour aider la personne en difficulté à accepter cette situation nouvelle.
La sauvegarde de justice
Un grand nombre de personnes sont amenées à aider un proche de plus de 60 ans dans ses tâches quotidiennes. Cette lourde tâche ne s'improvise pas et il peut être envisageable de mettre en place une mesure de protection juridique pour protéger temporairement une personne vulnérable dans les actes de la vie civile.
La sauvegarde de justice semble être la procédure la plus adaptée aux séniors en perte d'autonomie qui ont encore besoin de pouvoir agir librement mais sans encourir de danger.
1/ Qu'est-ce que la sauvegarde de justice ?
La sauvegarde de justice permet de protéger la personne âgée pour une courte durée, dans le cas où elle serait malade ou ferait l'objet de troubles mentaux temporaires. Cette décision est limitée dans le temps et rapide. Elle intervient simplement pour protéger le sénior en perte d'autonomie dans l'attente d'une mise en place de mesures plus protectrices comme la curatelle ou la tutelle. Cette mesure de protection légale est la plus légère. Elle laisse effectivement le sénior libre de ses actes qui demeure le seul à avoir la faculté de vendre ou donner ses biens.
Toutefois, la justice pourra intervenir pour annuler ou réduire des initiatives manifestement contraires à ses propres intérêts. Le tribunal analysera la bonne ou la mauvaise foi des personnes qui ont fait affaire avec le sénior en fonction de sa fortune. Il considérera également l'utilité ou non de l'opération en cause afin de prendre la plus juste décision. La liberté d'aller et venir de la personne âgée n'est en aucun cas atteinte, l'objectif est réellement de limiter le pouvoir de décision administratif et économique du sénior.
2/ Qui est concerné par la sauvegarde de justice ?
Toute personne majeure n'étant plus capable de gérer ses intérêts peut être mise sous sauvegarde de justice. Cela peut être dû à une altération de ses facultés mentales ou physiques, ce qui peut surgir en vieillissant. La personne âgée perdant peu à peu son autonomie se trouve alors incapable d'exprimer sa volonté ou peut être amenée à produire des erreurs irrationnelles dans la gestion de ses comptes. Bien que ses capacités de jugement sont altérées, elle est suffisamment saine d'esprit pour rester libre de ses actes. En cela, la sauvegarde de justice est une mesure adaptée aux séniors qui désirent agir seuls mais qui ont besoin d'être protégés. Ainsi, la justice surveille les agissements de la personne âgée qui pourront être annulés s'ils ne sont pas conformes à ses intérêts personnels et qu'il est estimé qu'elle se met en danger.
3/ Quand mettre en place la mesure de sauvegarde de justice ?
Lorsque le degré de dépendance est assez conséquent, la sauvegarde de justice peut être envisagée dans l'optique de protéger durablement le sénior vulnérable dans un avenir proche avec la mise en place d'une curatelle ou d'une tutelle. Pendant l'instruction d'une demande de cette mesure encore plus protectrice, la personne âgée a tout de même besoin d'une protection immédiate. Cette solution peu contraignante est une mesure préventive qui ne peut être mise en place qu'avec l'accord d'un médecin. La personne âgée est effectivement jugée médicalement inapte à gérer son patrimoine de manière provisoire. Si elle a subi un accident ou qu'elle rencontre des problèmes de santé, ce type de procédure peut être exigé.
4/ Qui a la possibilité de demander la sauvegarde de justice ?
Le sénior lui-même ainsi que les proches ont la faculté de saisir la justice. Il peut s'agir d'un enfant, un frère ou une soeur, les parents s'ils sont toujours en vie, le conjoint ou le concubin, un allié ou une personne entretenant des liens stables et très étroits avec le sénior. Toute autre personne souhaitant demander la sauvegarde de justice a l'obligation de s'adresser au procureur de la République. C'est le cas du médecin traitant qui est un acteur essentiel. Il est bien entendu qualifié pour demander la procédure à partir du moment où il diagnostique une réelle altération des facultés de la personne à protéger. Le juge des tutelles saisi par un tiers ou par le procureur de la
La République est alors compétent pour placer le sénior sous sauvegarde de justice et ne le fait que s'il a en sa possession une confirmation par un médecin spécialiste.
5/ Comment est mise en place la procédure de sauvegarde de justice?
La sauvegarde de justice peut être mise en oeuvre sur décision médicale ou judiciaire. Si le demandeur opte pour la voie judiciaire, on parle plus précisément de sauvegarde judiciaire. La personne qui en fait la demande doit adresser une lettre au juge des tutelles siégeant au tribunal d'instance du lieu de résidence de la personne âgée. Elle doit indiquer l'identité de la personne à préserver et expliquer les faits irraisonnés.
Le courrier doit impérativement être accompagné d'un certificat médical circonstancié établi par un médecin expert pour prouver l'affaiblissement des facultés de la personne âgée. La demande doit également comportée un extrait d'acte de naissance. La mise en sauvegarde médicale est demandée par le médecin traitant du sénior s'il constate qu'une protection est indispensable. Ce type de sauvegarde sera plus facile à mettre en place car la mesure sera plus rapidement instaurée. Le médecin fait une déclaration auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance du domicile de la personne âgée. Un médecin généraliste doit obligatoirement faire confirmer son avis par un gériatre ou un psychiatre pour voir sa demande acceptée.
La sauvegarde de justice par voie médicale et judiciaire aura un effet légal d'un an, renouvelable pour une unique année supplémentaire, en attendant le prononcé de la curatelle ou de la tutelle. La mesure de sauvegarde de justice prend alors fin, mais elle peut également être radiée par le procureur de la République.